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L’endométriose fait les frais d’une errance médicale conséquente, à ce jour il n’existe toujours aucun traitement définitif et on ne guérit pas de l’endométriose. Si certains traitements sont sur le marché, ils sont encore peu nombreux et pas toujours suffisamment efficaces. Mais à force d’informer et grâce au combat constant et acharné de nombreuses militantes, l’endométriose est de plus en plus connue et la recherche avance, doucement mais sûrement … Mais doucement. Cette pathologie est étudiée en fac de médecine depuis 2020, c’est bien trop récent, mais c’est enfin au programme.

Dans une conférence menée par la Fondation Recherche Endométriose en novembre 2022 « Les patientes au cœur de la Recherche sur l’endométriose[1] », on découvrait que de manière générale « il y a peu d’équipes de recherches qui travaillent sur l’endométriose. Moins de 10 équipes de recherche travaillent sur l’endo en Recherche fondamentale. » C’est bien trop peu. « Et aucune équipe de recherche ne travaille à temps plein et n’est entièrement dédiée à l’endométriose. » La chercheuse épidémiologiste Marina Kvaskoff déplore « Cela s’explique notamment par le fait qu’il y a peu de financements sur la recherche sur la santé des femmes en général. C’est aussi une maladie qui a été longtemps méconnue, elle est donc toujours assez méconnue des chercheurs. » C’est assez simple, pas de recherche, pas de solution et pas de traitement. Voilà pourquoi il est primordial que la recherche s’intéresse enfin à cette pathologie afin de proposer enfin un accompagnement digne de ce nom aux patientes atteintes d’endométriose.

Recherche et avenir de la pathologie

Dans une autre conférence de la Fondation Recherche Endométriose « Promouvoir la recherche scientifique sur l’endométriose[2] », Jean Rosenbaum, Directeur de recherche INSERM, explique que les besoins aujourd’hui sont avant tout « d’apporter des fonds pour développer la recherche. Il est aussi nécessaire de fédérer les chercheurs qui travaillent actuellement sur l’endométriose ainsi que d’intéresser les chercheurs qui travaillent sur des disciplines connexes, comme les spécialistes de la migration de l’invasion cellulaire dont les compétences seraient les bienvenues pour étudier ce qui se passe dans l’endométriose. » Marina Kvaskoff rappelle qu’il est important de « sensibiliser les chercheurs sur ce qu’on ne sait pas sur la maladie mais aussi d’attirer plus de femmes dans la recherche sur l’endométriose. Parce que si plus de femmes s’intéressent à la santé des femmes, on aura plus de connaissances sur le sujet. »

Pour l’instant, « l’urgence est de préciser les chiffres liés à l’endométriose. On sait que 10% de femmes sont touchées par l’endo, mais c’est un chiffre qui n’est pas suffisamment précis. Il faudrait aussi étudier l’incidence de la maladie et son évolution, ainsi que les facteurs de risques pour se renseigner sur les causes de l’endo à visée de prévention et les profils d’évolution de la maladie et quels facteurs vont jouer dessus. Enfin, étudier les différentes formes de la maladie et les grands profils à risques de patientes. »

État des lieux de la recherche dans le monde

Il existe aujourd’hui des pistes intéressantes de recherches sur l’endométriose, qui aident à comprendre d’où provient la maladie ou encore comment la diagnostiquer plus facilement.

En 2020, des recherches ont révélé que « les personnes atteintes d'endométriose présentent certaines modifications chimiques de leur ADN, alors que celles qui ne souffrent pas de cette maladie n'en présentent pas. Ces différences impliquent la méthylation de l'ADN, un processus par lequel les composés du groupe méthyle se lient à l'ADN, ce qui peut modifier l'activité des gènes. Et ces modifications de méthylation semblent varier en fonction de la gravité de l'endométriose. À l'avenir, ces modifications de l'ADN pourraient être utilisées pour aider à diagnostiquer l'endométriose sans intervention chirurgicale[3]. » Ce serait effectivement une avancée majeure et plus que nécessaire afin de rendre le diagnostic de l’endométriose plus accessible et moins invasif.

Comme Marina Kvaskoff l’a précisé, il est important de se pencher sur les facteurs de risques et les causes de cette pathologie. Il semblerait que les abus sexuels puissent être liés à l’endométriose. En effet, « il y a une augmentation de 79 % du risque d'endométriose confirmée par laparoscopie chez les femmes ayant déclaré avoir subi des sévices chroniques graves de types multiples. Nous avons observé une association entre l'exposition à la violence pendant l'enfance et l'adolescence et le risque d'endométriose. La violence physique et sexuelle est associée au risque d'endométriose, la gravité de la violence, la chronicité et l'accumulation des types de violence étant associées à une augmentation du risque de manière dose-réponse[4]. »  Pour rappel, une femme sur 10 a été ou sera violée au cours de sa vie d’après le Collectif Féministe Contre le Viol (CFCV) …

Par ailleurs, la recherche sur les animaux « a révélé que les toxines présentes dans l'environnement, comme la dioxine, peuvent avoir un impact sur le système reproducteur, le fonctionnement hormonal et le système immunitaire d'une manière qui augmente le risque de développer une endométriose. Cependant, les chercheurs n'ont pas encore prouvé ces liens chez l'homme. En outre, plusieurs études ont exploré le lien potentiel entre l'endométriose et l'exposition à des toxines telles que les biphényles polychlorés, le bisphénol A et les esters de phtalate. Mais les scientifiques doivent mener d'autres études pour déterminer si ce lien existe et quelle est sa force[5]. » Encore une preuve, s’il en fallait une, que les femmes ne sont pas responsables de leur maladie … Et que la pollution environnementale fait rage et des ravages.

Le cannabidiol pour soulager l’endométriose ?

Dans une étude menée en 2021[6], on découvre que « pour 81% des personnes interrogées, leurs symptômes étaient "beaucoup mieux" pour la douleur et 59% d’entre elles ont été en mesure d'arrêter complètement la prise d’anti-douleurs, notamment des opioïdes (40 %). » Ainsi, « le cannabis est considéré comme une intervention efficace contre la douleur et d'autres symptômes de l'endométriose, avec des effets de substitution potentiels sur l'utilisation des opioïdes. » A prendre avec beaucoup de pincettes, mais c’est une piste qu’il pourrait être intéressante d’explorer lorsque les anti-douleurs ne font pas ou plus effet, comme c’est le cas pour de nombreuses femmes.

État des lieux de la recherche en France

En Janvier 2022, le gouvernement a annoncé un « Plan National de Lutte contre L’endométriose[7] » qui consiste en 3 axes prioritaires de mise en œuvre :

  • Placer la France aux avant-postes de la recherche et de l’innovation sur l’endométriose
  • Garantir un diagnostic rapide et l’accès à des soins de qualité sur l’ensemble du territoire
  • Communiquer, former et informer l’ensemble de la société sur l’endométriose

Ce Plan National a donc pour but de sensibiliser la population, mais aussi les professionnels de santé et faire avancer la recherche afin de faciliter la prise en charge des patientes atteintes par la pathologie. Si ces mesures sont toutes extrêmement importantes, reste maintenant à les voir se concrétiser et à porter leurs fruits.

Ça dessert la cause : la gueguerre entre médecines conventionnelles et thérapies complémentaires

Depuis quelques mois, on voit émerger de nombreux reportages dénonçant le nouveau business des thérapies alternatives comme « Le business lucratif des “remèdes” à l’endométriose » publié chez Radio France en novembre 2022[8]. Il est notamment question de leur reprocher leur côté mercantile. Si certains « gourous » abusent complètement et y voient un moyen de se faire de l’argent sur le dos de patientes désespérées quitte à les mettre en danger, il est de bon ton de rappeler, au passage, que la santé au sens large est un business, et que les laboratoires qui produisent les traitements contre l’endométriose ont eux aussi des intérêts financiers. Il serait alors plus judicieux d’allier ses forces et d’enfin considérer ces thérapies comme étant « complémentaires » à la médecine classique et dite « conventionnelle » et de mieux les encadrer, afin d’en éviter les éventuelles dérives. Les patientes n’en seront que gagnantes lorsque les traitements traditionnels atteignent leurs limites. Elles pourront ainsi se tourner vers des alternatives plus sereinement et sans prendre de risques.

 

Rédigé par Gala Avanzi - Journaliste

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